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Actualité

Message Patriarcal pour la nouvelle année écclésiastique (2022)

No de protocole 470

† BARTHOLOMAIOS
PAR LA GRÂCE DE DIEU ARCHEVÊQUE DE CONSTANTINOPLE,
NOUVELLE ROME, ET PATRIARCHE ŒCUMÉNIQUE
QUE LA GRÂCE, LA PAIX ET LA MISÉRICORDE
DE NOTRE SEIGNEUR, DIEU ET SAUVEUR JÉSUS CHRIST,
AUTEUR DE TOUTE LA CRÉATION,
SOIENT AVEC LE PLÉRÔME DE L’ÉGLISE

 

Honorables frères et enfants bien-aimés dans le Seigneur,

En entrant aujourd’hui avec la bénédiction de Dieu dans la nouvelle année ecclésiastique, nous honorons, au cours de cette fête de la l’Indiction, la « Journée de protection de l’environnement naturel » et nous adressons au Créateur de toutes choses des prières de louange et de remerciements pour « l’immense don de la création ».

Une fois de plus, nous déclarons à voix haute que le respect envers la création et le souci permanent pour sa protection sont inhérents à notre identité orthodoxe, comme un de ses biens les plus précieux. L’Église sait et enseigne que la cause de l’hostilité de l’humain envers la création « très bonne » et envers son semblable c’est « l’éloignement de Dieu ». Elle rappelle résolument qu’il n’y a pas de véritable liberté sans la Vérité et en dehors de la Vérité, force libératrice par excellence. « Vous connaîtrez la vérité et la vérité fera de vous des hommes libres » (Jn 8, 32).

Depuis plus de trois décennies, moyennant diverses initiatives, la sainte Grande Église du Christ répand avec insistance et dynamisme le message écophile de l’orthodoxie. Le 1er septembre 1989 marquera et symbolisera à jamais le début d’un mouvement béni qui : porta des fruits abondants ; releva les racines et les paramètres spirituels et moraux de la destruction de l’environnement naturel ; mobilisa des personnes et des institutions ; inspira le monde chrétien ; montra la voie pour affronter ce grand problème. Ce chemin passe, premièrement, par la compréhension du lien de ce problème avec la crise de la liberté humaine, du besoin de changer radicalement de mentalité et de comportement envers la création ; deuxièmement, par la nécessité pour l’humanité d’engager une action commune, étant donné les dimensions universelles et les retombées tragiques du désastre écologique.

L’importante production littéraire en matière d’écologie théologique – dans laquelle les études du professeur et académicien, le métropolite Jean de Pergame, occupent une place centrale – constitue un précieux legs pour l’avenir. Les exposés présentés au cours de neuf symposiums écologiques internationaux, organisés en mer – auxquels ont participé d’éminents experts scientifiques, et des représentants du monde politique et intellectuel – sont aussi une source intarissable d’inspiration. Ces documents sont aussi particulièrement utiles pour l’éducation environnementale qui revendique un rôle prépondérant dans l’enseignement contemporain. Il a été pertinemment dit qu’« à l’avenir une instruction sans orientation écologique sera une parodie d’éducation ».

Le développement durable est le seul chemin possible. Assurant l’équilibre écologique dans le présent et constituant une garantie pour l’avenir, il pose ses conditions : l’économie écologique, le changement du mode de production agricole et industrielle, de la production et de l’usage de l’énergie, des moyens de déplacement et de transport de biens, de nouveaux modèles de consommation etc. Malheureusement, les bonnes intentions, les accords et les déclarations demeurent souvent une simple théorie, de « grands mots », sans contrepartie dans la pratique, des « chèques sans provision », comme cela a été écrit. L’humanité ne tire pas leçon du changement climatique, des incendies désastreux, des canicules, des inondations, de la dégradation fulgurante de la biodiversité, de la pollution de l’atmosphère et des mers, de la déforestation, ainsi que des retombées sociales de la crise environnementale, avec, en tête, l’émigration environnementale massive. Elle continue à se faire des illusions sur la capacité innée de la nature à se protéger et à surmonter les blessures causées par l’être humain. Nous savons, mais nous continuons à agir comme si nous n’étions pas informés ; à refouler la vérité, selon laquelle, concernant la relation avec l’environnement naturel, la civilisation contemporaine technocratique axée sur l’économie n’est pas le progrès, puisque la destruction majeure de l’environnement naturel s’est produite à notre époque, ère de la suprématie de la science et de l’économie. Le changement climatique est un désastre causé par l’irresponsabilité humaine et le modèle sans issue d’organisation de la vie économique. Nous n’avons d’avenir que si nous comprenons que la protection de l’intégrité de la création non seulement ne constitue pas un obstacle au développement économique, mais le vecteur de vrais progrès.

Cette année, les célébrations de la Journée de protection de la création résonnent en même temps que le bruit des armes en Ukraine, le cri des victimes de guerre, les bombardements des villes et des infrastructures, la nature qui en souffre aussi et les soupirs des réfugiés. Toute guerre est une catastrophe humanitaire et écologique. Hormis la destruction des milliers de vies humaines et la pollution de l’environnement naturel, la violence persistante oblige des États et des peuples à revenir à des pratiques peu respectueuses de l’environnement pour assurer leur suffisance énergétique. Ainsi, l’humanité entre dans un nouveau cercle vicieux d’impasses désastreuses. Cela confirme l’idée que l’homo sapiens continue encore de nos jours à se comporter parallèlement en homo demens, en dément et insensé.

Frères dans le Seigneur et enfants bénis,
Pour l’Église, conformément à une formule éminemment théologique, les éléments du monde « ne sont pas simplement des χρήματα, matières utile aux besoins humains, mais aussi des πράγματα, c’est-à-dire des actes – accomplissements d’une Personne créatrice ». Toutes les œuvres du Seigneur Le bénissent, Le célèbrent et L’exaltent à jamais, les cieux racontent Sa gloire. C’est ce message qu’exprime la sollicitude de la Grande Église pour la protection de la création. La vie de l’Église du Christ est un avant-goût de tout ce que nous attendons en tant que réalité dans le Règne du Père et du Fils et du Saint-Esprit. En chemin vers les choses dernières, la sainte Église offre au monde comme guide l’Évangile de la grâce et la certitude inébranlable que le mal, sous toutes ses formes, n’aura pas le dernier mot dans l’histoire.

En concluant, nous souhaitons que la nouvelle année ecclésiastique soit heureuse et fructueuse, et, par l’intercession de la toute-Sainte Mère de Dieu Pammakaristos, nous invoquons sur vous la grâce vivifiante et l’infinie miséricorde du Christ notre Dieu, auteur et rédempteur de la création, chef de notre foi immaculée et qui la mène à sa perfection, Auquel appartiennent la gloire et la puissance dans les siècles des siècles. Amen !

1er septembre 2022
† Bartholomaios de Constantinople
priant pour vous Dieu avec ferveur