Sermon pour le dimanche d’Orthodoxie (24 mars 2024)
La victoire de l’Eglise sur l’hérésie de l’Iconoclasme a été confirmé historiquement au premier dimanche du Grand Carême en 843 et, depuis lors, ce premier Dimanche du Grand Carême s’appelle le Dimanche de l’Orthodoxie. Cette victoire, elle-même, signifie beaucoup plus qu’une mémoire de l’histoire de l’église. Beaucoup plus que l’obtention du droit de garder les icônes dans les temples et de les admirer comme des grands achèvements d’art. Cette victoire était une victoire sur toutes les hérésies avant l’Iconoclasme, et l’essence de toutes ces hérésies qui ont tourmenté l’église à travers des siècles est la même – elles étaient et sont un mensonge emballé en vérité. Le mensonge que Dieu n’est pas présent parmi les hommes, qu‘il ne s’est pas fait apparaitre sur terre, qu’il reste toujours distancé et qu’il est indiffèrent à nous.
Le triomphe sur l’Iconoclasme est donc une confirmation et une vérification de La Vérité, du Christ même comme une présence réelle et véritable de Dieu sur terre, l’incarnation de l’amour de Dieu. Dieu est présent il est amour! Il fallait néanmoins payer le prix pour cette confirmation par le sacrifice, le grand sacrifice, tel que la mort du Fils de Dieu Incarné. Pourquoi un tel prix? Parce que ce qui dominait le monde était un mensonge emballé en vérité. La vérité révélée par Dieu à son peuple élu avait été déviée. Elle avait été transformée en un mensonge emballé en vérité. Une grande hypocrisie prévalait et on peut dire que cette interprétation et épreuve de la vérité était une grande hérésie.
Malheureusement ce qui se passait durant l’histoire de la vie de l’Eglise était le fait qu’une telle déviation se répétait. Et quel était le résultat chaque fois qu’une hérésie apparaissait ? Le mensonge, le même mensonge que Dieu n’était pas présent et qu’il n’importait pas au genre humain. Une telle vue ne résulterait qu’en une division, opposition, séparation et haine. Autrement dit ce n’était que le triomphe du péché. Le péché pas comme une offense morale, mais comme un manque de but de notre existence, le but pour lequel on est créé et pour lequel on vit sur la terre.
Aujourd’hui nous devons constater que l’histoire se répète. Parce que le triomphe du péché, le signe principal de sa domination sur le monde, dans lequel non seulement nous vivons mais dont la réalité nous composons, est division,
opposition, séparation, haine. Des divisions parmi les peuples orthodoxes, des divisions parmi les orthodoxes qui appartiennent à un même peuple, des divisions parmi les orthodoxes qui sont des membres d’une même communauté, des divisions parmi les orthodoxes qui sont d’une même famille; et on pourrait continuer infiniment à nommer de telles divisions. On aime bien s’appeler « orthodoxe » et on croit de cette façon qu’on est exceptionnel, plus exceptionnel que les plus exceptionnels, mais on n’est pas alors conscient qu’on voit ansi l’Orthodoxie comme une idéologie où, dans le meilleur des cas, comme une belle tradition avec des coutumes exotiques. Mais une idéologie n’est pas La Vérité ; une tradition, aussi belle et attrayante soit-elle, n’est pas une solution au problème de la mort. Ni idéologie, ni tradition n’apportent la victoire sur le mensonge, sur le péché, sur la mort. C’est le Christ qui le fait. Personne d’autre que Lui!
Aujourd’hui, rassemblés ici pour célébrer ce que on appelle Orthodoxie, il faut que nous nous arrêtions et réfléchissions. Il faut que nous nous posions la question: Est-ce que nous sommes des véritable chrétiens, c’est à dire, les authentiques témoins de La Vérité où plutôt des hypocrites? Est-ce que nous témoignons de la Vérité, ç’ est à dire le Christ, dans nos vies et dans notre Église, ou sommes-nous plutôt des serviteurs du mensonge, des serviteurs du péché ? Du même mensonge de l’époque du Christ, du même mensonge de toutes les hérésies.
Et Lui, le Christ, mes chères frères et soeurs, en priant Dieu le Père dit: «Afin qu’ils soient un…. comme toi et moi nous sommes un. Père saint, garde-les unis à toi, toi qui es uni à moi».
Il n’y a qu’une seule voie pour témoigner de La Vérité, pour témoigner du Christ, pour témoigner de l’Orthodoxie et cette voie est de travailler sur l’unité, de répandre son sang pour l’unité, de travailler contre division, opposition, séparation et haine. Pas au niveau abstrait, mais au niveau concret, au niveau de la vie quotidienne. C’est garder l’unité du mariage, se pardonner au sein de notre paroisse, surmonter des obstacles qui nous font nous éloigner les uns des autres, afin que nous puissions témoigner véritablement de Celui qui nous a créé pour qu’on soit un. Si on témoigne de Lui, on est avec Lui. Si on est avec Lui, on est un comme Lui qui est un avec Dieu le Père. C’est la seule façon pourque nous devenions des orthodoxes car être orthodoxe n’a jamais signifié enseigner théoriquement les dogmes orthodoxes et connaitre la foi Orthodoxe au niveau
intellectuel, encore moins connaître des coutumes orthodoxes. Depuis toujours être orthodoxe a signifié être “orthopraxe”, c’est à dire pratiquer le contenu de la foi orthodoxe – suivre et appliquer ce qui est offert au sein de l’Eglise, sans avoir une approche sélective, mais en acceptant tout ça comme des moyens d’établir des bonnes relations avec les autres et de garder l’unité. Rien de plus difficile que d’achever cela dans la réalité de ce monde divisé, mais en même temps c’est la seule façon d’être digne de s’appeler orthodoxe.
On vient de prier aujourd’hui et on prie dans chaque Divine Liturgie pour l’unité des Saintes Eglises de Dieu. On le fait encore et sans cesse parce que tout le reste nous mène à la mort. Par contre être véritablement orthodoxe mène au Christ. Il faut à ce titre suivre l’invitation faite par Philippe à Nathanaël: Viens et vois et en meme temps etre véritable «Israélite», véritable fils où fille de Dieu, sans ruse en soi meme. Il ne faut pas etre hypocrite. Si nous nous comportons comme ça, en vérité, en vérité nous verrons le ciel ouvert et les anges de Dieu monter et descendre au- dessus du Fils de Dieu qui est la Voie, la Vérité et la Vie.
Gloire au Père et au Fils et au Saint Esprit maintenant et toujours et dans les sicles des siècles. Amen!
Père Bojan Radicevic