Message patriarcaldiffusé à l’occasion de Noël
Message patriarcal
diffusé à l’occasion de Noël
† BARTHOLOMAIOS
PAR LA GRÂCE DE DIEU ARCHEVÊQUE DE CONSTANTINOPLE, NOUVELLE ROME, ET PATRIARCHE ŒCUMÉNIQUE,
À TOUT LE PLÉRÔME DE L’ÉGLISE
GRÂCE, MISÉRICORDE ET PAIX DU CHRIST SAUVEUR NÉ À BETHLÉEM
Très vénérables frères hiérarques, enfants bien-aimés dans le Seigneur,
Par la grâce d’en haut, nous sommes arrivés cette année encore à la solennité de la Nativité selon la chair de Dieu le Verbe, venu sur terre et ayant vécu parmi nous «par une charité indicible». Nous honorons par des psaumes et des hymnes, et dans une joie ineffable, le grand mystère de l’Incarnation «ce renouveau des renouveaux, le seul nouveau sous le soleil», ouvrant à l’humain la voie de la déification par grâce et renouvelant la création tout entière. Noël n’est pas une expérience sentimentale, qui «arrive vite et s’en va encore plus vite». C’est une participation existentielle à l’événement entier de l’Économie Divine. Comme en témoigne l’évangéliste Matthieu, les dirigeants du monde ont voulu d’emblée anéantir le Divin Enfant. Pour les croyants, avec le chant «Christ est né» fêtant l’Incarnation du Fils et Verbe de Dieu le Père et avec le glas de la Passion, sonne aussi «le Christ est ressuscité», le message joyeux de la victoire sur la mort et de l’attente de la résurrection commune.
Le chant «Gloire à Dieu au plus haut des cieux et paix sur la terre» résonne encore dans un monde plein de violences, d’injustice sociale et d’effondrement de la dignité humaine. Les impressionnants progrès scientifiques et technologiques n’atteignent pas la profondeur de l’âme humaine, car l’homme surpasse toujours ce que la science peut concevoir et ce que vise le progrès technologique. Le fossé entre le ciel et la terre n’est pas scientifiquement comblé dans l’être de l’homme.
On parle aujourd’hui du «méta-humain» et l’on vante l’intelligence artificielle. Certes, le rêve d’un «surhomme» n’est pas nouveau. L’idée du «méta-humain» est basée sur le progrès technologique et sur l’apport à celui-ci de moyens sans précédent dans l’expérience et l’histoire humaines, grâce auxquels il pourra surpasser la mesure humaine en vigueur jusqu’à présent. L’Église n’est pas technophobe. Elle aborde la connaissance scientifique comme un «don de Dieu à l’homme», sans toutefois ignorer ou passer sous silence les dangers du scientisme. L’Encyclique du saint et grand Concile de l’Église orthodoxe (Crète, 2016), souligne la contribution du christianisme aussi «au sain développement de la civilisation séculière» puisque Dieu «a placé l’homme en tant que gérant de la création divine, associé à Son œuvre». Ensuite, elle note avec insistance: «À la place de l’«homme-dieu» contemporain, l’Église orthodoxe affirme le «Dieu-homme» comme mesure ultime de tout: «Nous ne parlons pas d’homme déifié, mais de Dieu fait homme» (Jean Damascène, Exposé de la foi orthodoxe, 3, 2, PG 94, 988).
Avec le titanisme et le prométhéisme de la civilisation technologique, ses évolutions et transitions, au milieu des trans-humanisations ou sur- humanisations anthropothéistes, à la question cruciale comment sauver, jusqu’au «huitième jour» dernier, la «culture de la personne», comment sauver le respect au caractère sacré de la personne et comment démontrer sa beauté, la réponse est donnée une fois pour toutes dans le mystère de la Divino-humanité. Dieu le Verbe s’est fait chair, la «vérité est venue» et «l’ombre s’est dissipée». À tout jamais, ce qui est vrai pour l’homme sera lié à sa relation avec Dieu, comme réponse à la descente de Dieu vers lui, et comme attente et élan vers la rencontre du Seigneur de gloire. Cette foi vivante soutient la lutte de l’être humain pour affronter les contradictions et les défis de sa vie terrestre, de sa vie quotidienne, sa survie et son développement social et culturel. Cependant, rien dans notre vie ne prospère sans une référence à Dieu, sans avoir pour horizon «la plénitude de vie, la plénitude de joie et la plénitude de connaissance» de son Royaume.
Noël est une occasion pour cerner le mystère de la liberté de Dieu et le grand prodige de la liberté de l’homme. Christ frappe la porte du cœur humain, mais seul l’homme doté de liberté peut l’ouvrir. Le bienheureux Georges Florovsky écrit: «Certes, sans Lui, sans le Christ, l’homme ne peut rien faire. Et pourtant, il y a cependant quelque chose que seul l’homme peut faire – répondre à l’appel de Dieu et ‘recevoir’ le Christ».
Par le «Oui» à l’appel d’en haut, le Christ se révèle comme «la vraie lumière», comme «le chemin et la vérité et la vie», comme la réponse aux questions et quêtes ultimes de l’esprit, aux désirs du cœur et aux espoirs de l’homme, mais aussi à la question «d’où» vient la création et «pour quoi faire». Nous appartenons au Christ, en Lui toutes choses sont unies. Christ est «l’Alpha et l’Oméga, le Premier et le Dernier, le commencement et la fin». Dans Son incarnation volontaire «pour nous les hommes et pour notre salut», le Dieu Verbe «n’a pas habité dans un homme particulier, mais il a revêtu de sa propre hypostase la nature humaine», étayant ainsi la commune destination éternelle et l’unité de l’humanité. Il ne libère pas un seul peuple, mais la race humaine tout entière; Il n’opère pas seulement une réforme salvatrice de l’histoire, mais Il renouvelle la création entière. De même pour l’histoire, de même pour toutes les choses, vaut de façon définitive et déterminante, l’idée «avant le Christ» et «après le Christ».
Durant sa vie dans le monde, dans l’histoire et à travers elle vers les choses dernières, vers le jour sans déclin du Règne céleste du Père, du Fils et du Saint-Esprit, l’Église «qui n’est pas de ce monde» témoigne de la vérité, accomplissant son œuvre sanctifiante et spirituelle «pour la vie du monde».
Frères et enfants dans le Seigneur,
Pliant pieusement le genou devant la Mère de Dieu tenant l’enfant, et nous prosternant humblement devant «le Verbe qui était au commencement» qui assuma notre condition humaine, nous vous souhaitons à tous une période bénie de douze jours et que la nouvelle année de l’ère du Seigneur soit heureuse, saine, paisible, fructueuse en bonnes œuvres, remplie de joie spirituelle et de dons divins.
Noël 2024
† Bartholomaios de Constantinople fervent intercesseur de vous tous en Dieu