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Actualité

5ième dimanche du Grand Carême – Sainte Marie d’Egypte

Cette année-ci,  nous commémorons la vie de la Sainte Marie d’Egypte le dimanche 5 avril.

Née à Alexandrie en Egypte au milieu du Ve siècle, à l’âge de 12 ans Marie quitte ses parents, et elle tombe dans le piège du désir insatiable et de la prostitution, qui durera dix-sept ans, de ses 12 à 29 ans. Malgré sa vie très peu vertueuse, un jour, se trouvant à Jérusalem, par curiosité, elle voulut aller voir la précieuse Croix du Christ. Elle s’aperçut qu’elle était incapable d’entrer dans l’église où Sainte Hélène avait placé la Croix, car une force invisible l’ empêchait d’y entrer. Elle fut si effrayée qu’elle demanda à la Mère de Dieu, par l’intermédiaire d’une icône à l’entrée de l’église, d’intervenir pour que les portes de l’église puissent s’ouvrir. La Mère de Dieu lui répondit que Marie avait d’abord besoin de se repentir et de lui obéir. C’est seulement après avoir promis de faire cela que Marie fut autorisée à entrer dans l’église de Jérusalem. Après être entré et avoir vénéré la Croix, Marie entendit la Mère de Dieu lui dire: « Si tu traverses le Jourdain, tu trouveras la vraie paix ». Ceci étant, Marie traversa le Jourdain, s’en alla dans le désert, et y vécut le reste de sa vie dans la repentance, luttant contre toutes ses passions et contre les souvenirs de celles-ci.

La vie de la Sainte Marie d’Egypte nous sert d’exemple. Pourquoi ?

Revenons d’abord sur les thèmes d’avant Carême, car, nous nous rappelons aussi l’évangile de la semaine dernière quand Jésus dit à ses disciples : « Ce genre d’esprit ne peut être chassé que par la prière et le jeune » (Mc 9 :29), des propos de notre Seigneur qui pourraient aussi être d’application aux les temps difficiles que nous vivons tous maintenant.

Ces mots expliquent exactement ce que signifie le carême : la lutte contre les passions. Mais, on doit savoir contre quelles passions prier, et contre quelles passions jeûner. Quel était cet esprit qui avait envahi ce jeune homme et le faisait « baver de rage »? Quels sont ces passions, quels sont les soi-disant démons que lui, et nous, devons chasser ? Voilà bien des questions que plusieurs d’ entre nous peuvent se poser.

C’est exactement ce que l’Eglise essaye de nous expliquer dans la période d’avant Carême, nous préparant pour le carême pendant quatre dimanches, évoquant chacun, à travers leurs lectures évangéliques, les étapes fondamentales de la conversion, en attirant l’attention sur les thèmes suivants : la valeur de l’humilité et de la prière humble, le remord et notre conversion ou « metanoia », l’amour du prochain dans le cadre de notre salut ou du jugement dernier, et le pardon Divin.

La vie détaillée de sainte Marie l’Egyptienne nous enseigne beaucoup de choses. Peut-être que la première et la plus évidente des leçons que nous puissions en tirer est qu’il ne faut jamais juger, jamais préjuger. Qui sera sauvé? Est-il possible de répondre à cette question ?

Absolument pas, car il n’est jamais trop tard pour se repentir, même pour nous. Humainement, en considérant la vie de Marie jusqu’à sa vingt-neuvième année, nous pourrions penser que le salut lui était devenu impossible. Et pourtant, à travers les hymnes, on l’appelle «la plus grande des saints». Humainement, nous sommes condamnés, mais par la grâce de Dieu tout est possible, y compris le sommet du repentir. Personne n’a le droit d’en juger un autre, il ne nous appartient pas. Laissons cela à notre Créateur.

La vie de sainte Marie d’Égypte nous enseigne également quelque chose sur la nature humaine. En chacun de nous, il y a des désirs. Quand on dit désir, on parle de plaisirs mondains, d’amusement et de divertissement, de nourriture et de boissons, de plaisirs des sens. Ajoutons-y aussi le désir du pouvoir, du pouvoir sur l’autre, du pouvoir au travail, du pouvoir politique, et le plaisir que l’on y trouve en abaissant ou humiliant son prochain.

Finalement il y a la quête pour la richesse, l’argent, l’or,  et tout cela en abondance. Il s’agit d’ un désir ardent qui, de nos jours, règne sur le monde, et qui est vraisemblablement à l’origine de nombre de conflits, problèmes, guerres, et qui sait, directement ou indirectement des situations mondiales comme celle d’aujourd’hui.

En effet, nous pourrions nous poser la question si tous ces événements n’ont pas une cause dans notre façon de vivre, dans nos passions de pouvoir, d’argent et de désir de tout contrôler et maîtriser, et de s’enrichir sur le dos de notre prochain. Où s’arrête la maîtrise, et où commence le chaos ?

On oublie souvent de mentionner qu’il existe aussi le désir de plaisirs d’un niveau supérieur, de plaisirs durables, que nous pourrions appeler des joies. Ces joies sont tellement plus élevées que les plaisirs éphémères des sens qu’elles constituent à elles seules le chemin du bonheur durable. Les sociétés qui ne se consacrent qu’à la satisfaction des plaisirs des sens, les sociétés en quête de plaisir, sont des sociétés sans joies durables, elles ont des visages tristes.

Et puis il y a le désir pour le spirituel, la bonheur et la joie spirituelle. La vie de sainte Marie l’Egyptienne nous enseigne que les valeurs de l’Église sont très différentes de celles du monde. Tandis que le monde cherchait le plaisir, la satisfaction des sens, l’argent et le pouvoir, Marie avait disparu dans le désert. Elle n’avait rien, pas d’amis, pas de maison, pas de biens, pas de vêtements et presque pas de nourriture ni de boisson, elle était sans argent et impuissante dans ce monde. Ceci est tout à fait opposé à toute la pensée, toute l’organisation, et à toutes les manières de ce monde. Mais, notre Seigneur a prêché de tels propos et, comme lui, sainte Marie les a vécus.

L’Évangile d’aujourd’hui confirme le choix de Sainte Marie, car il est dit que « Celui qui veut devenir « grand » parmi vous sera votre serviteur. Celui qui veut être parmi vous le premier sera l’esclave de tous, car le Fils de l’homme n’est pas venu pour être servi, mais pour servir, et donner sa vie en rançon pour la multitude. » (Mc 10 :43-45). »

En effet, l’Église appelle Sainte Marie «la plus grande des saints». L’utilisation de ce mot «grand» peut surprendre. Dans la vie de tous les jours, nous utilisons le terme «grand» dans d’autres sens. Le monde parle de «grands politiciens», de «grands soldats», de grandes vedettes de cinéma», de «grandes performances sportives», de «grandes vacances», d’une « grande voiture», du «grand capital», parfois même de «grands chefs de certaines églises». En revanche, notre Église qualifie Sainte Marie de grande. Un millénaire et demi après sa naissance, nous lui supplions de faire sa prière, mais pas celle d’un homme politique, d’un soldat, d’une star de cinéma ou d’un sportif. Il s’agit d’une prière humble, venant en aide à toutes nos faiblesses. Réfléchissons plus attentivement avant de prononcer ce mot «grand».

En fait, ce 5ième dimanche du Grand Carême, avec sa mémoire de la Sainte Marie d’Egypte, pas trop tôt. En ce début de la dernière semaine de jeune, le rappel d’un exemple ascétique tellement grand ne peut autre que de nous encourager à continuer nos efforts probablement déjà affaiblis de cette longue période de jeûne.  Sainte Marie l’Égyptienne nous rappelle qu’il ne suffit pas de se repentir de ses péchés en paroles, mais que nous devons aussi avoir la détermination de ne plus y revenir.

De plus, en cette période très difficile que nous vivons de part le monde, réfléchissons sérieusement à notre façon de vivre, de répondre à l’appel des passions matérielles et charnelles, de sorte que le monde puisse subir une « metanoia », pour ne plus revenir à la vie d’avant.

Que cette grande figure d’ascète soit pour nous un exemple et un modèle dans la lutte contre nos péchés. En pensant à Celui qui s’est sacrifié pour nous et pour notre salut ne nous désespérons pas de notre salut, mais préparons-nous pendant les deux semaines suivantes avec de nouvelles forces pour la fête de la Résurrection, pour la victoire sur toutes les tentations de ce monde et actuelles, en se rappelant les tribulations de sainte Marie l’Egyptienne, et celles de notre Seigneur lui-même, même si pour la plupart d’entre nous ce sera une fête sans Divine Liturgie ! Intensifions et multiplions nos prières, tous ensemble.

Amen

+D. Filip Boone